
LES RÉVOLTES
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1975 – 1991 : entre ghetto et assistanat
En 1975, le « printemps harki » marque une période de révolte parmi les habitants des camps de Bias et de Saint-Maurice-l’Ardoise. Le 7 mai 1975, les habitants de Bias se soulèvent, suivis par ceux de Saint-Maurice-l’Ardoise le 19 mai. Cette révolte, marquée par sa propagation rapide à des hameaux de forestage et diverses concentrations urbaines de Français musulmans, prend de nombreux observateurs par surprise. Pourtant, elle fait suite à de multiples grèves de la faim à travers la France, comme celle de Laradji à Évreux au début de 1974, puis à l’église de la Madeleine à Paris en mars 1975.
Cette révolte est principalement menée par des jeunes nés durant la guerre d'Algérie. Suivant M’Hamed Laradji et son association, la CFMRAA, ce mouvement prend une dimension nationale. En plus de l’occupation des camps, des prises d’otages ont également lieu. Ces Français marginalisés dénoncent leur exclusion depuis 1962 avec des slogans tels que : « Après la trahison, l’abandon ; après l’abandon, l’exil ; après l’exil, l’oubli ».
Face à cette insurrection des « rapatriés sans patrie », le Conseil des Ministres adopte, le 6 août 1975, des mesures d’urgence pour apaiser le mécontentement des Français musulmans. La cité de Saint-Maurice-l’Ardoise est détruite fin 1976, tandis que celle de Bias subsiste encore quelques années. Cependant, au lieu d’une véritable politique, des structures et organismes de suivi se succèdent, montrant l’incapacité à résoudre les difficultés des harkis et de leurs enfants. Après le SFM, les BIAC sont créés en 1975, suivis par la Délégation nationale à l’action sociale éducative et culturelle en 1982, rapidement transformée en ONASEC par Raymond Courrière. En 1981, 28.500 personnes, soit 3.560 familles, vivent encore dans 65 zones de forte concentration (23 hameaux ou anciens hameaux de forestage et 42 cités urbaines).
Cette situation stagnante conduit à une nouvelle révolte en été 1991. Cette fois-ci, les enfants d’anciens harkis, nés en France et n’ayant connu ni la guerre d’Algérie ni le pays natal de leurs parents, s’insurgent. L’émeute commence dans la cité des Oliviers à Narbonne et s’étend à travers la France, notamment dans les villes et concentrations de familles d’anciens supplétifs : Saint-Laurent-des-Arbres, Carcassonne, Jouques, Bias, Avignon, Amiens…
1991 à aujourd’hui : vers une véritable reconnaissance ?
Les années 1990 marquent un tournant dans la reconnaissance des anciens harkis en France, avec une prise en compte officielle par les pouvoirs publics, l’affirmation de leur identité et une esquisse de reconnaissance historique.
Les pouvoirs publics commencent à reconnaître la spécificité des harkis, influencés par leur poids électoral et l’arrivée en politique d’une génération sensible à la question harkie. La loi n°94-488 du 11 juin 1994 constitue une première reconnaissance officielle. Cependant, cette loi ne satisfait pas pleinement les harkis, et de multiples grèves de la faim et autres actions revendicatives continuent dans les années 1990.
Durant cette période, le terme « harki » s’affirme fièrement. Les nouvelles associations, souvent dirigées par des jeunes nés en France, se réfèrent directement à l’histoire de leurs pères. Le terme « harki » devient omniprésent dans le nom des associations, montrant une évolution identitaire.
Enfin, une médiatisation plus intense des anciens supplétifs se développe, liée à une résurgence de la mémoire de la guerre d’Algérie. Des travaux universitaires sur les harkis et leurs familles se multiplient, avec au moins un mémoire soutenu chaque année depuis les années 1990.
La reconnaissance officielle des harkis le 25 septembre 2001 et le débat parlementaire sur les rapatriés débuté le 3 décembre 2003 sont perçus comme des avancées. Le 23 février 2005, le Parlement vote la dernière loi portant reconnaissance des rapatriés et harkis. Cependant, des litiges persistent : la situation des enfants d’anciens supplétifs ayant vécu dans les camps, les difficultés des veuves, la libre circulation en Algérie et surtout la reconnaissance de la responsabilité de l’État.
Aujourd’hui, le défi est de transformer cette mémoire blessée en une histoire franco-algérienne sereine et dépassionnée.
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أدخل الله الحركيين وأراملهم وعائلاتهم في جنته الواسعة، آمين.
Vidéo du 06/02/1965 : Les Harkis à Nantes